Notions Fondamentales du Dharma
par Patrick
Dans sa véritable signification, le terme « Brâhmane » ne signifie pas celui qui appartient à la première caste dans le système hindou des castes, mais le Sage accompli, l'Eveillé total, l'Arhat, celui qui a abandonné tout attachement aux « trois mondes des phénomènes, kâma-loka, rûpa-loka et arûpa-loka », ce que devait être le Brâhmane de caste avant sa dégénérescence du temps du Bouddha, temps qui ressemblait déjà au notre actuel. Le clan du Bouddha fut exterminé par le roi du Kosala, Virudaka, au Népal de l'époque.
Et l'on peut ainsi rappeler la dégénérescence des systèmes religieux actuels qui font encore de grands gestes, de grandes vagues, torturent leurs adversaires, les fusillent, instaurent des modifications sociales en s'associant aux politiques avides, font de « justes » guerres, des milliers ou des millions de morts et d'éclopés, des destructions sans nombre. Aussi, en tant que « chefs religieux », ils imposent leurs dogmes par le fer, le feu et le sang, multipliant les souffrances, et tout cela pour sauver les autres ?! …
A l'époque du Bouddha, si les rites et les cérémonies sont préservés et pratiqués avec une certaine rigueur par les brâhmanes, l'enseignement qui devait toujours les accompagner est alors et déjà vidé de son contenu métaphysique. Le Bouddha le comprit.
Cette dégénérescence s'infiltra alors ensuite au sein des « bouddhismes » au cours des siècles et les actuels chercheurs sont de plus en plus égarés car confrontés à cette difficulté de trouver un instructeur authentique du Dharma, instructeur qui soit capable de leur transmettre justement et au minimum la profondeur du « Noble Sentier Octuple ». Nous ne parlerons pas ici de la « chaîne des origines interdépendantes » que peu de bouddhistes connaissent, ni des « 37 auxiliaires de la Bodhi » indispensables pour comprendre, sinon on ne comprend rien au Dharma.
Si chacun peut savoir que ce Sentier Octuple est symbolisé par une Roue à 8 Branches sur le drapeau Indien, jusque-là tout va bien en tant que rappel. Mais retrouver cette roue en un insigne cousu sur un béret militaire est étrange, une aberration, une profanation, une folie même indiquant une inversion des valeurs, et le fait que l'enseignement n'est pas assimilé, intégré.
Qui comprend donc la profondeur de ce Sentier, Dharmacakra, et l'applique à sa vie quotidienne ?
Ce Sentier, en trois parties en huit membres, est le remède, « Quatrième Noble Vérité » (au-delà des vérités relatives), le traitement de la maladie de l'errance, samsâra. Sa formulation demande l'éclairage d'un instructeur éveillé par l'intuition métaphysique, Prajñâ (Pro-gnosis en grec).
Prajñâ : Vue juste et Intention juste
Sîla : Parole juste, Action juste, Moyens d'existence justes
Samâdhi : Effort juste, Attention vigilante juste, Concentration-composition-synthèse juste.
Un professeur du bouddhisme à l'Inalco dira récemment que, selon lui, les « varna », les castes, étaient le meilleur système social qu'il connaissait, et qu'il n'y en avait pas de meilleurs ! Cette affirmation bien réductrice révèle une confusion par ignorance de l'Intuition métaphysique, la Connaissance métaphysique ou transcendante qui est au-delà de l'intellect limité.
Le Chapitre XXVI du Dhammapada : Versets sur le Brâhmane, donne une Vue claire métaphysique, subtile, du véritable statut de Brâhmane « hors caste ».
L'Eveil, par la BODHI, étant supra-mondain, dépasse la notion des quatre castes qui sont uniquement mondaines dans le bourbier du kâma-loka, le monde des désirs jamais satisfaits.
Le Bouddha était a-varna, « hors les castes », même s'il naquit dans la seconde des castes, celle des guerriers. La notion de guerrier se rapporte ici à soi-même, à cela qu'il faut abandonner. Si l'ennemi est extérieur il est surtout intérieur et en contact avec l'illusoire de l'extérieur. Le Bouddha quitta le monde à 29 ans pour une ascèse. Dès que vous quittez le monde pour une ascèse (s'exercer), bien entendu guidée par la BODHI au sein du Dharma atemporel, vous sortez de tous les systèmes, de toute caste, de tout bouddhisme sauf si dans ce bouddhisme le plus souvent ethnique, le guide instructeur est lui aussi par simplification et lucidité sorti des systèmes et capable de transmettre les fondamentaux. A ce titre, même des chercheurs de castes inférieures peuvent ainsi atteindre l'éveil total par la Bodhi, par conséquent si leur Prajñâ est éveillée. L'histoire ne manque pas d'exemples de parias éveillés, ce qui est rassurant.
A l'origine, le Bouddhisme est vigoureux, Porte-greffe, mais les « greffons » sont de plus en plus éloignés de la nature du Porte-greffe (Dharma atemporel) par dégradation métaphysique, par occultation des résultats subtils, par difficulté d'atteindre des états de Connaissance transcendante élevés. Quand on parle d'écoles bouddhiques, il s'agit bien de « greffons » apparus au cours des temps, poussés sur le tronc du Dharma, le Porte-greffe. Ces greffons ont eu pour raison d'être les différentes conformations du cœur psychologique, les uns forts et capables de s'en tenir à la Tradition Primordiale, les autres ayant besoin des soutiens du phénoménal subtil, des rites, des cérémonies, des apparats religieux, des mythes, parfois du rappel d'imprégnations religieuses passées, donc de béquilles toujours fragiles.
Le Dharma, en toute tolérance, accepte d'intégrer, mais « scolastiquement », les « traditions » des pays où il s'implante, pourvu que les éléments (les fondamentaux) de ces traditions soient en accord ou à peu près avec la Tradition Primordiale.
Pour nous, le seul garde-fou est de s'en tenir à la Tradition Primordiale sans exclure une compréhension de « sympathie » pour toutes les écoles.
Nous terminerons en rappelant que le Dharma atemporel, retrouvé et transmis par le Bouddha, n'est ni une religion, ni une philosophie au sens occidental. La Prajñâ est d'abord noétique avant qu'elle ne devienne anoétique, dans ce cas indicible, inexprimable par les mots. Voilà la difficulté.